SFAD M2 Philosophie

HPHCU02- Langue vivante disciplinaire

Bruno Langlet

 

Les propriétés des choses : quelques aspects du débat dans la philosophie anglo-saxonne contemporaine.

 

Nous étudierons ici deux aspects d’une discussion qui anime une partie de la philosophie contemporaine et qui, si elle déborde aussi du cadre de la philosophie de langue anglaise, y a toutefois pris ses racines, et s’est développée en y étant régulièrement revitalisée.

 

Premier volet : universaux et particuliers. Les choses ordinaires possèdent des propriétés en vertu desquelles certaines d’entre elles agissent sur d’autres, ainsi que sur nous-mêmes, par le truchement de notre appareil perceptif. Ces propriétés semblent, pour certaines entités, être similaires : ainsi, nous reconnaissons aisément que les membres d’une même espèce animale ou végétale partagent des traits caractéristiques (les oies présentent des ressemblances fortes, par exemple), ou encore que les mêmes qualités se retrouvent dans des choses de type différent (le rouge des fraises, des baies, de telle étoffe, du sang). Ces entités semblent donc avoir des propriétés en commun, mais comment concevoir ces dernières ? Ne consistent-elles qu’en ressemblances ou sont-elles des propriétés répliquées à l’identique (des universaux) entre diverses choses ? S’il faut alors admettre des universaux, sont-ils de types différents, comme le défendait par exemple Jonathan Lowe, admettant des universaux substantiels (d’espèce) et non-substantiels (transversaux aux espèces) ? Y a-t-il aussi un sens à défendre une théorie des universaux non-instanciés, sur le modèle de la théorie platonicienne ? Ou bien faut-il soutenir que les propriétés des choses sont irréductiblement particulières, comme l’affirment les défenseurs des théories des tropes ?

 

Deuxième volet : propriétés, pouvoirs et dispositions. Les propriétés des choses, qu’elles soient universelles ou particulières, sont caractérisées par des pouvoirs d’agir et de pâtir, autrement dit par leur capacité à produire des effets et à en subir. Ces pouvoirs, classiquement, sont considérés comme étant fondés sur des caractéristiques qualitatives, comme le soutenait par exemple John Locke en distinguant qualités premières et qualités secondes. Certaines entités ont, de plus, des propriétés qui ne sont pas toujours manifestes, comme la fragilité de tel verre de cristal, ou la fusibilité de l’or. D’autres propriétés, comme les couleurs, semblent consister dans des dispositions à éveiller, au sein, de systèmes perceptifs, l’expérience localisée de la couleur, et donc être des dispositions presque constamment actives. Ces dispositions sont certes fondées sur ce qui semble être des caractéristiques qualitatives, aussi appelées propriétés catégoriques, mais la relation entre celles-ci et les dispositions qu’elles manifestent n’est parfois pas claire. D’autre part, ce que nous tenons pour des propriétés catégoriques ne dépend-il pas des dispositions de constituants existant à une autre échelle, où les entités (par exemple, celles décrites par la physique contemporaine) ne se laissent caractériser que par les effets qu’elles produisent ou qu’elles subissent, et donc par leurs facettes dispositionnelles ? La question est de déterminer si l’on peut soutenir qu’il y a, fondamentalement, des propriétés catégoriques et des propriétés dispositionnelles (leur relation étant à clarifier), ou bien seulement des dispositions, ou encore des propriétés toujours caractérisées par un double aspect irréductible qui leur confère à la fois un statut catégorique et un statut dispositionnel.

 

Nous proposerons un cheminement raisonné au sein de ce débat, parmi divers textes (extraits d’ouvrages et d’articles) centraux sur ces questions, afin d’en éclairer les aspects principaux, et de signaler les problèmes persistants et les discussions nourries qui les concernent. Nous traduirons un certain nombre de passages qui en éclairent les divers aspects.

 

(Évaluation finale : il s’agira, à partir d’un court texte qu’il faudra traduire en Français, de présenter et de discuter les thèses et problèmes qu’il met en avant, toujours en regard de l’arrière-plan du cours.)

 

Bibliographie indicative, qui sera complétée chemin faisant :

Allen, S. R., A critical introduction to properties, Bloomsbury, 2016.

Armstrong, D., Les universaux. Une introduction partisane, Ithaque, 2009.

Heil, J., Du point de vue ontologique, Ithaque, 2011.

Locke, J., Essai concernant l’entendement humain, Vrin, 2001 (pour la traduction récente).

Mellor, D. H., et Oliver, A.(dir.), Properties, Oxford, 2004.

Molnar, G. Powers, Oxford, 2003.

Nef, F, et Garcia, E. (dir.), Textes clés de métaphysique contemporaine, Vrin, 2007.

Tiercelin, C., Le ciment des choses, Ithaque, 2011.